L214 soutient la proposition de loi portée par Bastien Lachaud élargissant le droit de visite des parlementaires aux élevages et abattoirs
Le député Bastien Lachaud est convoqué ce jeudi 2 novembre au commissariat du 7e arrondissement de Paris. Un rassemblement de soutien y est prévu à 9h. Cette convocation fait suite à sa présence dans un élevage de cochons fournissant la marque Fleury Michon pour dénoncer les conditions d’élevage.
L214 rappelle la nécessité de pouvoir exposer publiquement les réalités de l’élevage et soutient à cet égard le dépôt d’une proposition de loi annoncé par Bastien Lachaud instaurant un droit de visite pour les parlementaires dans les élevages et dans les abattoirs.
Pour L214, ce droit de visite serait un outil nécessaire pour constater :
– l’écart abyssal entre la législation et les données scientifiques alertant sur les souffrances endurées par les animaux ;
– les manquements à la loi, alors que l’État a été condamné à plusieurs reprises pour carences dans ses missions de contrôle.
Des images indispensables pour faire évoluer le droit
L’élevage, en particulier lorsqu’il est intensif, est incompatible avec les notions les plus basiques de bien-être animal. Les études scientifiques sont de plus en plus nombreuses pour documenter les souffrances découlant des fortes densités d’élevage, de la génétique, des mutilations ou encore de l’environnement pauvre et dénué de toute distraction. L’autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a récemment publié de nombreux rappports en vue d’une révision de la réglementation européenne promise mais qui, sous la pression des filières, est actuellement repoussée sine die. Sans une mobilisation citoyenne, les travaux scientifiques restent dans les tiroirs ou sont simplement instrumentalisés par les filières, les recommandations voire les alertes scientifiques restent lettre morte. C’est pourquoi, les images sont essentielles pour rappeler très concrètement la réalité de ce que vivent les animaux, pour le droit des citoyens à être informés. Sans images, sans témoignages, les animaux sont totalement invisibles, le débat public n’existe pas : seules les images contrôlées par les filières peuvent circuler, choisies pour favoriser les actes d’achat et non l’information objective.
Un droit de visite parlementaire pour contrôler l’action de l’Etat
L’insuffisance des contrôles effectués par les services de l’État dans les élevages et dans les abattoirs n’est plus à démontrer.
S’agissant des élevages, seul 1 % d’entre eux est contrôlé chaque année au titre de la « protection animale », selon l’objectif fixé par la Direction Générale de l’Alimentation : un élevage est donc contrôlé en moyenne une fois tous les 100 ans (plan national de contrôles officiels pluriannuel 2021-2025, p.45).
D’ailleurs, L214 constate régulièrement que des pratiques pourtant interdites par la loi sont pratiquées de façon systématique et routinière. Suite à une enquête de L214 publiée mi-octobre, un éleveur a par exemple reconnu pratiquer la castration à vif des porcelets pourtant interdite depuis janvier 2022. En août, après que L214 a porté plainte contre un élevage breton, le tribunal correctionnel de Brest l’a condamné à une amende de 20 000 €, notamment pour coupe systématique des queues des cochons.
Concernant les abattoirs, L214 a récemment obtenu plusieurs condamnations de l’État pour carence fautive de ses services dans leur activité de surveillance et de contrôle des abattoirs. Des décisions du tribunal administratif soulignent que même dans les quelques cas où le nombre de contrôles avait été suffisant d’un point de vue quantitatif, ceux-ci n’avaient pas permis la mise en conformité des abattoirs. Malgré la gravité et la persistance des non-conformités, les services vétérinaires s’étaient en effet contentés d’avertissements ou de mises en demeure auxquels ils ne donnaient pas suite.
Un droit de visite qui existe déjà dans d’autres domaines
Rappelons que, depuis 2000, les parlementaires disposent déjà d’un droit de visite des établissements pénitentiaires, qu’ils peuvent exercer à tout moment.
Ce droit de visite a ensuite été étendu à plusieurs reprises, notamment aux établissements de santé chargés d’assurer les soins psychiatriques sans consentement et aux centres éducatifs fermés pour mineurs.
Dans certains cas, les parlementaires peuvent même être accompagnés de journalistes.
Le dispositif vise à garantir l’accès des parlementaires à des lieux dont les citoyens sont exclus. L’accompagnement de professionnels de la presse contribue à la transparence et à la pertinence du débat public.
Un droit de visite déjà reconnu comme nécessaire
En 2016, suite à l’indignation provoquée par les enquêtes révélées par L214 dans les abattoirs d’Alès et du Vigan, une commission d’enquête sur les abattoirs est créée sous l’impulsion du député Olivier Falorni, alors membre du groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste (RRDP).
Parmi les 65 propositions de son rapport la Commission recommande 15 mesures principales dont la création pour les parlementaires d’un droit de visite des abattoirs, avec possibilité d’être accompagnés de journalistes.
En 2017, l’examen parlementaire de la proposition de loi d’Olivier Falorni reprenant ces propositions s’est interrompu avec les élections législatives et la fin de la XIVe législature.
L’été dernier, suite à l’enquête révélée par L214 sur l’abattoir de Bazas et constatant que « malgré une opinion publique qui exprime de plus en plus clairement ses attentes, malgré de nombreuses tribunes, malgré des avancées législatives, des questions écrites et des amendements, force est de constater que les scandales se succèdent et des manquements à la réglementation sont toujours constatés », les députés Olivier Falorni (MoDem et Indépendants), Vincent Ledoux (Renaissance), Karine Lebon (GDR-NUPES) et Corinne Vignon (Renaissance, présidente du Groupe d’études «Condition et bien-être des animaux»), ont interrogé le gouvernement sur la mise en place de cette mesure afin « d’identifier et d’éradiquer les pratiques inacceptables et de prévenir les mauvais traitements envers les animaux, tout en assurant le respect des réglementations en vigueur ».
Pour Brigitte Gothière, cofondatrice de L214 : « En sa qualité de représentant de la Nation, le député Bastien Lachaud est allé constater par lui-même la situation effroyable des animaux dans un élevage de cochons. En partageant son témoignage, il a démasqué les discours marketing et démontré la nécessité de légiférer. Exposer publiquement les problèmes générés par l’élevage, notamment intensif, est le travail préalable indispensable à toute évolution des pratiques et du droit.
Au moment où il est convoqué en audition, l’État vient d’être condamné par 4 fois pour ses manquements en matière de contrôle au titre de la “protection animale” dans les abattoirs où les services vétérinaires sont pourtant présents en permanence. Leurs objectifs de contrôles annuels dans les élevages plafonnent à 1 % d’élevages contrôlés…
La proposition de Bastien Lachaud d’un droit de visite parlementaire permettra aux parlementaires de mieux connaître les conditions d’élevage, de transport et d’abattage des animaux et de relever les manquements des exploitants et de l’État. Nous avons besoin d’élus informés pour que les lois soient plus justes et mieux appliquées. »