Suite aux images catastrophiques révélées par L214 le mercredi 15 mars, la préfecture de la Manche a annoncé ce jeudi 16 mars dans un communiqué de presse que les faits mis en évidence par L214 « n’ont pas été constatés le jour du contrôle officiel le 15 mars après-midi » dans l’élevage laitier de Saint-Ovin. L214 dénonce une communication fallacieuse des services de l’État et demande un rendez-vous à la préfecture.
Pour Sébastien Arsac, directeur des enquêtes de L214 : « L’association a souligné de nombreux faits, le communiqué de presse de la préfecture manque de détails. Il est possible que les vaches à l’agonie filmées il y a quelques jours soient mortes depuis et que les cadavres aient été évacués à l’équarrissage, mais nous n’avons pas de précision là-dessus, la préfecture ne nous ayant pas contactés suite à notre signalement.
Il semble néanmoins difficile d’imaginer que la situation catastrophique de cet élevage ait été résolue en 24 h. Que sont devenus ces animaux à l’agonie ? Nous avons fourni les numéros d’identification des animaux à la préfecture, ils savent ce qui leur est arrivé. N’ont-ils pas vu les veaux attachés ? La couche épaisse d’excréments ? Les densités extrêmes ?
Le procureur a ouvert une enquête judiciaire et a toutes les pièces en sa possession. En attendant, nous demandons à la préfecture un rendez-vous pour faire la lumière sur les faits identifiés par ses services et sur le parti-pris de sa communication. »
Le communiqué de la préfecture note des non-conformités sans les détailler et souligne qu’elle a ordonné à l’éleveur des mesures correctives. Qu’en est-il exactement ? Le rapport d’inspection n’a pas été rendu public à cette heure.
Ce n’est pas la première fois que L214 est confrontée à une communication fallacieuse de la part des services de l’État. En voici deux exemples parlants :
- En 2020, suite aux images que L214 avait publiées concernant l’abattoir de veaux Sobeval, le ministère et les services vétérinaires avaient nié l’existence d’infractions. Une fuite de mails du ministère de l’Agriculture montrait que les services de l’État avaient préparé des « edl [éléments de langage] béton ». Interrogé à ce sujet, le ministre de l’Agriculture avait perdu son sang-froid et arraché le micro des mains d’un journaliste de France 5 avant d’ordonner la fermeture temporaire de l’abattoir pour « manque de maîtrise des conditions d’abattage des animaux ».
- La même année, les services vétérinaires avaient remis en question les images de L214 et conclusions concernant un élevage de cochons de l’Allier fournissant la marque Herta, concluant après une inspection à « la bonne tenue de l’élevage et à l’absence de non-conformité majeure ». L214 y avait vivement réagi. Deux mois plus tard, L214 avait rendu publiques de nouvelles images du même élevage qui confirmaient les non-conformités déjà mises en évidence. La préfecture avait alors reconnu les faits. Cet élevage avait d’ailleurs été condamné par la justice pour la coupe systématique des queues des porcelets, un jugement historique.
Les images filmées par L214 dans l’élevage de Saint-Ovin ne sont d’ailleurs pas contestées par la préfecture. L214 dispose des preuves de date et de lieu de toutes ses enquêtes, qui sont mises à disposition de la justice le cas échéant. L’association n’a d’ailleurs jamais été mise en défaut sur la véracité des images qu’elle a diffusées.