L214 fête ses 15 ans


Depuis sa création en 2008, L214 a réalisé plus de 130 enquêtes filmées montrant le traitement des animaux utilisés pour l’alimentation en France : élevages intensifs de poules, poulets, cochons, broyage des poussins et des canetons, « vaches à hublots », abattoirs… Mais ce n’est que la partie la plus visible de son travail : soutenue par plus de 50 000 membres, L214 dialogue également avec les entreprises, les politiques et les institutions pour faire reculer l’élevage intensif, et favoriser le développement de l’alimentation végétale. En 15 ans, l’association a contribué à faire évoluer les pratiques d’élevage et d’alimentation. Elle défend une révolution culturelle et politique majeure : prendre réellement en compte les intérêts des animaux et abolir les pratiques qui leur nuisent, en particulier l’abattage et la pêche.

Retour sur 15 faits marquants dans l’histoire de L214


1. Première enquête en immersion dans un abattoir : Sébastien Arsac, cofondateur de l’association, se fait embaucher en 2008 à l’abattoir Charal de Metz au poste d’aspiration des moelles. Il parvient à filmer en caméra cachée les conditions épouvantables de mise à mort de moutons et de bovins. Le même procédé permettra en 2021 à Thomas Saïdi d’exposer les graves carences des services vétérinaires d’un abattoir au sein duquel il s’est fait embaucher.

2. Fin programmée de l’élevage en cage des poules pondeuses : depuis ses débuts, l’association incite les entreprises à cesser la commercialisation des œufs de poules élevées en batterie. En 2010, elle obtient du groupe hôtelier Novotel le premier engagement d’une longue série. De 80 % en 2008, le pourcentage de poules élevées en cage en France est descendu à 33 % aujourd’hui. Grâce aux 180 engagements obtenus par L214 et d’autres ONG par le dialogue et les mobilisations citoyennes, l’élevage des poules en batterie devrait avoir disparu en 2025.

3. Fin du broyage des poussins : en 2014, L214 révèle pour la première fois en France les images du broyage des poussins mâles dans l’industrie de l’œuf et demande la fin de cette pratique. Condamné pour mauvais traitements envers les animaux suite à la plainte de L214, le couvoir dans lequel ont été filmées les images ferme définitivement en 2017. Annoncée de longue date, la fin du broyage des poussins de la filière œuf s’est concrétisée en décembre 2022 (l’élimination par gazage reste autorisée, affaire à suivre…).

4. Création d’une commission d’enquête parlementaire sur les conditions d’abattage : en 2015 et 2016, L214 dévoile une série d’enquêtes filmées dans les abattoirs d’Alès, du Vigan, de Mauléon-Licharre, de Pézenas et du Mercantour, du Vigeant et de Limoges (dont l’employé et lanceur d’alerte Mauricio Garcia-Pereira a révélé à visage découvert les pratiques d’abattage des vaches gestantes). Les premières images provoquent la création d’une commission d’enquête parlementaire sur les conditions d’abattage des animaux de boucherie à l’Assemblée nationale, durant laquelle L214 est auditionnée et son travail salué. Quelques jours plus tard, les images de l’abattoir de Mauléon-Licharre poussent le ministre de l’Agriculture à ordonner l’inspection de tous les abattoirs d’animaux de boucherie en France : les résultats montrent que 80 % des chaînes d’abattage inspectées présentent des non-conformités.

5. 75 000 abonnés à Mon journal animal  : créé en 2018, le magazine jeunesse de L214 est aujourd’hui diffusé auprès des structures accueillant le jeune public ou des particuliers. À travers des grands dossiers, des interviews, des fiches métiers, de l’actualité, Mon journal animal donne à ses lecteurs et lectrices de 10 à 14 ans les clés pour mieux connaître et protéger les animaux.

6. Mise en place de menus végétariens dans les cantines : aux côtés d’autres ONG comme Greenpeace ou le Réseau Action Climat, L214 se mobilise auprès des décideurs pour pousser la mise en place de repas végétariens dans les cantines scolaires. En 2018, après un vote serré à l’Assemblée nationale, l’expérimentation d’une alternative végétarienne hebdomadaire est votée dans la loi Alimentation. Une expérimentation réussie selon l’ANSES, qui sera entérinée par la loi Climat et Résilience, proposant même aux établissements volontaires d’introduire une option végétarienne quotidienne.

7. Fuite de mails du ministère de l’Agriculture dissimulant les dysfonctionnements de l’abattoir Sobeval : en février 2020, L214 dévoile une enquête filmée dans l’un des plus grands abattoirs de veaux français, où de nombreux dysfonctionnements sont observés. Services vétérinaires et ministres nient les faits, mettent en doute les images de L214. Une fuite de mails dévoile les rouages d’une communication manipulatrice des services du ministère. Les mails échangés confirment les non-conformités « indéniables voire majeures » observées par L214 dans l’abattoir. Une conseillère du cabinet du ministre demande « des edl [éléments de langage] béton pour ce soir…  qu’un autre fonctionnaire propose de transmettre à Interbev et FedeV (interprofessions de producteurs de la viande). Interrogé sur cette fuite de mails, le ministre de l’Agriculture s’énerve et arrache le micro des mains d’un journaliste de France 5 avant d’ordonner deux jours plus tard la fermeture temporaire de l’abattoir pour « manque de maîtrise des conditions d’abattage des animaux ». Quelques mois plus tard, le même ministre saluera L214 pour son travail d’enquête, regrettant que ce travail ne soit pas fait au sein de ses services.

8. Images des expérimentations zootechniques sur des « vaches à hublots » : présentée par Nagui, cette enquête filmée dévoile les pratiques du 1er centre privé européen de recherches en nutrition animale pour booster la productivité des animaux. Ce énième scandale autour du groupe Avril, qui est aussi le premier producteur d’œufs en France, le décide à renoncer à l’élevage en cage des poules pondeuses.

9. Fin de l’élevage des visons pour la fourrure : un an après la publication d’une enquête sur l’élevage des visons pour la production de fourrure, L214 participe en 2019 à un groupe de travail sur les élevages de visons créé à l’initiative du ministère de la Transition écologique. Ce groupe défend la fin de cette production avec accompagnement des filières. D’abord annoncé par la ministre Barbara Pompili, l’arrêt de cette production est finalement étendu à l’ensemble des animaux non domestiques en 2021 dans la loi Maltraitance animale.

10. Arrêt d’une partie des activités de la cellule Demeter : en 2019, une convention est signée entre le ministère de l’Intérieur, la gendarmerie, la FNSEA et les Jeunes Agriculteurs. Elle donne naissance à Demeter, une cellule de gendarmerie chargée de « surveiller les atteintes au monde agricole » et qui vise à renforcer la répression des lanceurs d’alerte. Suite au recours déposé par L214, le tribunal administratif de Paris enjoint au ministre de l’Intérieur de mettre fin aux activités de la cellule visant à la prévention et au suivi des « actions de nature idéologique ». Un signal positif pour les lanceurs d’alerte et la démocratie, bien qu’il ait été fait appel de cette décision.

11. 172 élus délégués à la condition animale dans les villes françaises : l’observatoire Politique & Animaux recense à ce jour 172 élus délégués à la condition animale au niveau municipal. La création de ces délégations est l’un des objectifs poussés par L214 lors des élections municipales à travers la charte « Une ville pour les animaux », avec l’instauration de repas végétariens ou l’exclusion des produits issus d’élevages intensifs de la commande publique, par exemple.

12. Lutte contre les 1 000 vaches et contre l’élevage intensif : dès 2011, L214 s’est engagée dans la mobilisation contre la « ferme des 1 000 vaches » aux côtés de la Confédération paysanne et de l’association de riverains Novissen. Après des années de lutte, l’élevage a fermé en 2021. Forte de cette expérience, L214 et ses groupes locaux accompagnent plus d’une trentaine de mobilisations pour stopper les projets de construction ou d’agrandissement d’élevages intensifs, ces élevages qui ne laissent aucun accès à l’extérieur aux animaux et qui enferment 80 % des animaux abattus en France.

13. Interventions en écoles hôtelières sur la cuisine végétale : depuis 2019, L214 intervient dans les écoles hôtelières pour initier les futurs chefs à la cuisine végétale. Une initiative qui vient compléter le travail de l’association sur le développement de l’offre végétale en restauration, notamment grâce aux bénévoles qui invitent les restaurateurs à proposer des options vegan à leur carte. Plus de 3 000 restaurants proposant des menus vegan sont ainsi référencés sur le site VegOresto.fr.

14. Condamnation historique sur la coupe systématique des queues des cochons : suite à la plainte déposée par L214 après deux enquêtes filmées en 2020 et en 2021 dans un élevage de cochons fournissant la marque Herta, la justice condamne pour la première fois la coupe routinière des queues, jusqu’ici tolérée par les autorités françaises bien qu’interdite depuis 20 ans par la réglementation. La procédure est en appel.

15. Happening dans un Burger King parisien : en novembre 2022, une centaine de bénévoles de L214 se sont entassés dans un restaurant Burger King déguisés en poulets pour reproduire les densités extrêmes des poulets dans les élevages intensifs. L’objectif était de dénoncer l’absence d’engagement du fast-food à mettre fin aux pires pratiques d’élevage et d’abattage des poulets, contrairement à une centaine d’entreprises en France.

L214 en chiffres


Aujourd’hui, L214 c’est :

  • 135 enquêtes filmées dans les élevages, transports, abattoirs ;
  • 50 000 donateurs et donatrices ;
  • 1 500 bénévoles répartis dans 41 groupes locaux en France ;
  • 95 personnes salariées toutes rémunérées au salaire unique (y compris la direction) et travaillant quasi exclusivement en télétravail. Parmi l’équipe salariée : 59 % de femmes, dont plus de 70 % aux postes de direction ;

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Pour Brigitte Gothière, cofondatrice de L214 : «  Lorsque nous avons participé à nos premiers plateaux TV, la défense des animaux était encore moquée ou taxée de  » sensiblerie « . D’ailleurs, on parlait surtout des chats, des chiens ou des animaux en voie de disparition, mais rarement des animaux qu’on mange. Pourtant, ils représentent 99 % des animaux possédés ou exploités par les humains, très loin devant les chiens et chats, les animaux de cirque, de laboratoire ou même ceux tués à la chasse !
Au fil du temps, nos images ont montré la face cachée de notre alimentation et la violence inouïe avec laquelle nous traitons les animaux. Aujourd’hui, la cause animale s’est imposée comme une véritable question éthique et politique. Les avancées concrètes restent difficiles à obtenir mais les petits pas se cumulent les uns aux autres, comme la fin annoncée de l’élevage en cage des poules pondeuses, la fin de la castration à vif des porcelets ou l’interdiction du broyage des poussins. La remise en question de l’élevage intensif est aujourd’hui fortement amorcée !
À l’horizon, il reste la question essentielle de la prise en compte des intérêts des animaux en tant qu’individus sensibles. Nous sommes convaincus que les générations futures instaureront avec les animaux une cohabitation respectueuse et dénuée de violence.
Depuis la création de l’association, nous avons un leitmotiv : agir le plus efficacement possible pour parvenir à la dissolution de L214 pour cause d’inutilité. Nous gardons cette ambition intacte !
 »


Interroger la légitimité de tuer les animaux

L214 est l’une des rares associations à remettre totalement en question le modèle agricole et alimentaire français, et à interroger la légitimité d’exploiter et de tuer les animaux sans nécessité. Elle souhaite ainsi l’abandon des pratiques qui leur nuisent, telles que l’élevage, la pêche et l’abattage.

Tentatives d’intimidation et de répression

Ces dernières années, les tentatives de répression du mouvement animaliste se multiplient :

  • la cellule de gendarmerie Demeter née d’une convention signée entre le ministère de l’Intérieur, la gendarmerie, la FNSEA et les Jeunes Agriculteurs (les deux syndicats agricoles majoritaires), vise clairement à faire taire toute critique du modèle agricole. Créée en 2019, cette cellule s’est notamment donné pour mission la prévention et le suivi des « actions de nature idéologique ». La justice a heureusement mis fin à cette mission suite au recours déposé par L214, mais il a été fait appel de cette décision (la date d’audience n’est pas encore fixée).
  • un amendement visant à priver de réduction d’impôt les dons aux associations « dont les adhérents sont reconnus coupables d’actes d’intrusion sur les propriétés privées agricoles et établissements industriels » a été adopté en commission des finances de l’Assemblée nationale avant d’être retoqué en séance plénière dans le cadre du projet de loi de finances pour 2023. Proposé depuis plusieurs années par un député breton, cet amendement vise à asphyxier financièrement les associations qui, comme L214, se font le relais de lanceurs d’alerte, et ce alors même que les « intrusions » visées par cet amendement sont déjà interdites et réprimées par le Code pénal.
  • une proposition de loi visant à davantage pénaliser les lanceurs d’alerte filmant la réalité des élevages et des abattoirs ou entravant la chasse a été déposée à l’Assemblée nationale en décembre 2022. Elle propose notamment d’alourdir les peines pour intrusion, de considérer comme facteur aggravant le fait de lancer l’alerte, et d’étendre l’activité professionnelle à la liste des mobiles constitutifs de discriminations.

Malgré ces attaques répétées, L214 poursuit son travail avec optimisme et détermination pour la 16ème année consécutive, et est fière de pouvoir compter sur le soutien indéfectible de ses 50 000 membres.