Enquête #4 dans un élevage de cochons des Côtes-d’Armor

Le 25/02/2022

 

« On sait que les algues vertes ont tué et il n’y a pas de raison qu’elles ne tuent pas encore. » – Yves-Marie Le Lay

 


L214 dévoile des images filmées1 dans un élevage intensif de cochons situé à Saint-Glen dans les Côtes-d’Armor. L’élevage, adhérent à la Cooperl, est proche d’un affluent du Gouessant2 qui coule dans la baie de Saint-Brieuc. Située dans cette baie, la plage de La Granville est fermée à cause de la dangerosité des algues vertes. Yves-Marie Le Lay, auteur de l’ouvrage Algues vertes, un scandale d’État et président de l’association Sauvegarde du Trégor, explique en quoi les élevages intensifs comme celui de Saint-Glen jouent un rôle prépondérant dans leur développement et comment elles tuent.

La vidéo montre par ailleurs l’enfer vécu par les cochons dans ce type d’élevage : enfermement, entassement, cages… De multiples infractions à la réglementation s’ajoutent à ces conditions d’élevage déjà préjudiciables aux animaux : claquage des porcelets, queues coupées de façon systématique, violences physiques…


Élevage intensif de cochons et algues vertes

 

Infractions à la réglementation

 

Dans cet élevage, plus de 400 truies donnent naissance à 12 000 cochons qui sont envoyés à l’abattoir chaque année.

Les conditions d’élevage intensif sont ici aggravées par des infractions, multipliant les souffrances endurées par les cochons :

  • les porcelets chétifs, jugés comme ayant peu de potentiel économique, sont tués en étant claqués (frappés) contre un mur. Ceux qui ne meurent pas immédiatement agonisent dans un seau. Cette pratique routinière ne répond pas au règlement européen du 24 septembre 2009 (article 2, d) définissant l’abattage d’urgence ;
  • la queue des cochons est coupée (caudectomie). Exercée en routine, cette pratique est interdite depuis près de 20 ans (arrêté du 16 janvier 2003, annexe, chap. 1er, 8) ;
  • les cochons blessés ou malades ne sont pas soignés, contrairement aux exigences du Code rural (chap. 6, article L226.6) ;
  • les truies sont contraintes à avancer à l’aide d’un pic en fer, ce qui est interdit par l’arrêté ministériel du 25 octobre 1982 ;
  • les animaux n’ont pas de matériaux manipulables comme l’exige l’arrêté du 16 janvier 2003 (annexe, chap. 1er, 4).

L214 porte plainte auprès du procureur de Saint-Brieuc pour mauvais traitements et sévices graves.

Les images montrent également que l’élevage utilise un arsenal de produits médicamenteux, dont des antibiotiques. Parmi eux, l’amoxicilline et la colistine, deux molécules classées d’« importance critique » (la catégorie la plus haute) par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en raison des risques d’antibiorésistance engendrés pour la population humaine3.

Les algues vertes tuent

 

Trois facteurs sont responsables de la présence des algues vertes : les baies peu profondes (les algues y prolifèrent plus rapidement), les conditions météorologiques (température, ensoleillement…), et les nitrates.

En Bretagne, les élevages intensifs de cochons, avec leur forte concentration d’animaux, rejettent d’énormes quantités de nitrates dans les sols et les cours d’eau à travers les déjections animales. Ces nitrates favorisent la prolifération des algues vertes dans les eaux bretonnes, en des quantités bien supérieures à la normale.


À quelques kilomètres de l’élevage, dans la baie de Saint-Brieuc, la plage de La Grandville, à Hillion, est fermée depuis plus de 7 mois.
Yves-Marie Le Lay, président de l’association Sauvegarde du Trégor, explique que les algues vertes en décomposition sont source de danger. Elles dégagent du sulfure d’hydrogène, un gaz qui, à concentration élevée, peut s’avérer mortel, pour les humains et les animaux, et peut provoquer une asphyxie de la faune et de la flore aquatiques.

Les algues vertes se développent à grande échelle sur les côtes bretonnes. La mort d’un joggeur, de deux chiens, d’un cheval, de 36 sangliers serait imputée aux algues vertes. Et d’autres accidents graves (malaise, asphyxie, coma) ont aussi été constatés.

Le procès simulé des algues vertes : un défi pour les juristes


L214 et Sauvegarde du Trégor participeront le 25 juin à la Cité Fertile à Pantin au prochain procès simulé organisé par l’association Wild Legal.

Ce procès fictif portera sur le préjudice subi tant par les cochons des élevages de Bretagne que par les écosystèmes et les êtres humains touchés par l’irruption mortelle des marées vertes sur le territoire breton, et plus particulièrement de la contamination des bassins versants du fleuve Gouessant, un écosystème parmi les plus touchés des Côtes-d’Armor.

Yves-Marie Le Lay : « On sait que les algues vertes ont tué et il n’y a pas de raison qu’elles ne tuent pas encore. Et quand elles ne tuent pas par accident, elles tuent ce qui vit en permanence dans le sable et la vase. »

Marine Calmet, juriste, présidente de l’association Wild Legal : « La racine du problème, c’est notre rapport au vivant. Notre procès simulé a pour ambition de montrer que le droit actuel doit évoluer pour construire un modèle juridique dans lequel les animaux et les écosystèmes ne sont pas réduits au simple statut d’objets ou de ressources. »

Pour Sébastien Arsac, cofondateur de L214 : «  En France, 95 % des cochons sont élevés dans les mêmes conditions que celles montrées par cette enquête. L’élevage intensif est un fléau. Et dehors, le danger est tout aussi présent pour les autres animaux, les humains, l’environnement. Il y a urgence. Il est temps de tourner la page de l’élevage intensif. Il est temps de prendre des responsabilités, de répondre à une demande sociétale forte. À ce titre, nous invitons tous les citoyens à signer notre pétition afin d’interpeller les candidats à l’élection présidentielle à s’engager contre l’élevage intensif. »

Une série d’enquêtes avant le Salon de l’agriculture


Ce samedi 26 février s’ouvre le Salon international de l’agriculture où sera dressée une image idyllique et fantasmée de l’agriculture française.

En contrepoint, et pour montrer la réalité concrète de ce que vivent les animaux, L214 diffuse du 22 au 26 février 2022 une série d’enquêtes représentatives de l’élevage en France, où 80 % des animaux abattus proviennent de systèmes intensifs.

Ce triste constat est très éloigné des attentes des Français qui sont 85 % à être favorables à l’interdiction de l’élevage intensif (dont ruraux, 86 % ; Paris, 81 % ; gauche, 88 % ; majorité présidentielle, 85 % ; droite, 82 % ; droite radicale et RN, 89 %) sondage Ifop pour la Fondation 30 Millions d’Amis de 2022.

Contact presse


1. Images tournées en décembre 2021 et en janvier 2022.
2. Partie du dossier d’une demande d’extension de l’élevage, 2007, p. 47.
3. World Health Organisation Critically Important Antimicrobials for Human Medicine, , 2016 (p. 26-27).

 

Algues vertes : la Cour des comptes pointe du doigt l’État et des élus bretons

 

Dans son rapport, la Cour des comptes pointe du doigt l’inefficacité des plans publics de lutte contre la prolifération des algues vertes. Elle dénonce des plans « mal définis » et le manque d’investissement et d’ambition des politiques publiques.

Sous l’égide du préfet, un nouveau plan de lutte pour la qualité de l’eau et la lutte contre les algues vertes, dans les Côtes-d’Armor, est en cours d’élaboration pour la période 2022-2027.

La problématique des algues vertes bat son plein également aux Pays-Bas. Afin de lutter contre ce fléau, les autorités néerlandaises ont voté pour la réduction d’un tiers du cheptel du pays, l’un des grands producteurs européens de produits animaux.

L’élection présidentielle, une occasion pour les candidats de s’engager contre l’élevage intensif

 

La cause animale et l’environnement constituent des enjeux électoraux majeurs. Si des responsables politiques prennent peu à peu la mesure des attentes des citoyens, leurs actes ne sont toujours pas à la hauteur.

Dans le cadre de l’élection présidentielle, L214 encourage les candidats à prendre des engagements significatifs et les recense sur son observatoire Politique & Animaux. Parmi les mesures portées par l’association figure la sortie de l’élevage intensif d’ici 10 ans et la démocratisation de l’alimentation végétale comprenant une réduction de moitié, en 5 ans, de la consommation de produits d’origine animale.

→ Découvrir la pétition de L214

→ Découvrir le site Politique & Animaux