Nouvelle enquête de L214 : cruauté à l’abattoir industriel de veaux Sobeval en Dordogne

Le 20/02/2020

L214 demande la fermeture immédiate de l’établissement

L214 dévoile aujourd’hui une nouvelle enquête1 menée dans l’un des plus gros abattoirs de veaux de France, produisant pour la société Sobeval (groupe Van Drie). Dans cet abattoir industriel situé en Dordogne, 3 400 veaux sont tués chaque semaine, à une cadence d’environ 90 veaux à l’heure. Tous les types d’abattage y sont pratiqués : abattages standards et rituels (casher et halal).

L’abattoir Sobeval, qui appartient au groupe hollandais Van Drie, leader mondial de la viande de veau, met à mort des veaux dont la viande est certifiée Label Rouge, bio, Saveurs du Périgord ou encore Le veau du boucher. Il exporte en Israël pour la viande casher et en Égypte pour la viande halal. Par ailleurs, en 2015, à l’occasion d’une visite du président de la région Aquitaine, le directeur de l’abattoir expliquait fournir des peaux à des marques de luxe comme Hermès ou Gucci, et fournir en viande le Jules Verne, le restaurant de la Tour Eiffel à Paris. Le groupe Van Drie fournit également les tanneries, récemment rachetées par Chanel.

enquête veaux abattoir Sobeval

→ Voir l’enquête commentée par Hugo Clément

→ URL de l’enquête sur Youtube

→ Voir et télécharger des images brutes

→ Voir et télécharger des photos de l’enquête

→ Voir le rapport complet d’enquête (66 p.)

À l’abattoir Sobeval, les violations de la loi sont multiples et concernent tout autant l’abattage rituel que l’abattage standard. Elles impliquent une souffrance accrue des animaux.

Abattage rituel

Concernant les abattages casher et halal, la plupart des veaux sont tués sans étourdissement. Lorsqu’il y a égorgement sans étourdissement préalable, la loi exige que les animaux soient immobilisés jusqu’à ce qu’ils ne présentent plus aucun signe de conscience ou de sensibilité. Un contrôle systématique de cette perte de conscience doit être effectué avant de mettre fin à l’immobilisation, ce qui n’est pas le cas à l’abattoir Sobeval.

Conséquence : de nombreux veaux présentent des signes de conscience et/ou de sensibilité avant et après avoir été suspendus à la chaîne d’abattage. Dans ce cas, l’étourdissement d’urgence imposé par la réglementation n’est quasiment jamais pratiqué.
Par ailleurs, il arrive que des veaux soient saignés en position debout sans être immobilisés, ce qui accentue grandement leurs souffrances.

Aggravant la situation, certains sacrificateurs effectuent un mouvement de scie lors de l’égorgement, ce qui augmente là aussi la douleur ressentie par les veaux. La disposition des box d’immobilisation est telle que des veaux voient leurs semblables mourir avant d’être eux-mêmes saignés.

De nombreux animaux vomissent le contenu de leur estomac par leur œsophage sectionné, souillant ainsi les carcasses.

Abattage standard

Pour augmenter les cadences d’abattage, l’abattoir Sobeval utilise un pistolet d’étourdissement de type « pneumatique » qui n’a pas besoin d’être rechargé entre chaque animal. Ce pistolet est très volumineux et, présenté face à l’animal, induit des réactions de peur et d’évitement. Pour contrer les mouvements de fuite, il est obligatoire de bloquer la tête des animaux lorsqu’un tel outil est utilisé. Contrairement à l’obligation réglementaire, à l’abattoir Sobeval la tête des veaux n’est pourtant jamais immobilisée au moment de leur étourdissement. Tous les étourdissements sont donc réalisés en violation de la réglementation. Ainsi, de nombreux tirs mal ajustés doivent être répétés, blessant les animaux sans les rendre inconscients.

Les contrôles de l’inconscience et de l’insensibilité des animaux étant quasi inexistants, de nombreux veaux reprennent conscience au moment de leur saignée. On peut voir sur les images un veau se relever à la sortie du box d’immobilisation après avoir été théoriquement étourdi.

Face à ces infractions, L214 porte plainte auprès du procureur de la République de Périgueux pour sévices graves envers des animaux et demande la fermeture d’urgence de l’abattoir, qui présente de graves problèmes structurels et des pratiques d’abattage grandement déficientes.

Les services vétérinaires (DDPP de Dordogne) habilités à intervenir pour faire cesser les infractions répétées à l’abattoir Sobeval semblent totalement indifférents au sort des animaux abattus malgré la présence permanente de plusieurs agents. L214 dépose un recours en responsabilité contre l’État.

Interdire l’abattage sans étourdissement

Cette enquête montre une nouvelle fois l’urgence d’interdire l’abattage des animaux sans étourdissement préalable, demandée par l’ensemble des associations de défense des animaux et 85 % des Français2 (IFOP pour 30 Millions d’amis, 2020). Le règlement européen sur la protection des animaux au moment de leur abattage stipule que les animaux doivent être étourdis avant d’être saignés. Cependant une dérogation existe pour les abattages rituels.
L’abattage sans étourdissement est pourtant jugé « inacceptable en toutes circonstances » par la Fédération des vétérinaires d’Europe. L214 a écrit à Didier Guillaume et attend une réaction rapide et adaptée du ministre de l’Agriculture.

Leur vie avant l’abattoir

L’enquête montre également des images d’un élevage de veaux semblable aux nombreux autres qui s’implantent dans la région, encouragés par le groupe Van Drie.
Dans ces élevages intensifs, les veaux sont entassés par centaines dans des bâtiments fermés, chacun ayant pour seul espace une cage individuelle de 80 cm de large par 150 cm de long les huits premières semaines de leur vie. Ils sont ensuite engraissés en groupe, dans des enclos au sol dur, sans paille, sans jamais avoir accès à l’extérieur. Pour supporter ces conditions d’élevage, ils reçoivent nombre de produits médicamenteux, dont des antibiotiques. Certains sont périmés.

Pour Sébastien Arsac, cofondateur de L214 : « Des élevages intensifs à l’abattage industriel, des milliers de veaux tués à l’abattoir Sobeval n’auront connu que l’enfer. Le pire reste l’abattage sans étourdissement. Halal ou casher, les animaux peuvent agoniser en toute conscience pendant de longues minutes. Il faut mettre un terme à l’abattage sans étourdissement. Mais il ne faut pas se voiler la face, l’abattage standard n’est pas en reste. Là aussi, les cadences et les ratés, qui ne manquent pas d’arriver, causent une souffrance sans nom aux animaux. Il y a urgence à fermer cet abattoir et, au-delà, à s’interroger sur la légitimité à continuer d’abattre des animaux sans nécessité. »

→ Voir l’enquête commentée par Hugo Clément

→ URL de l’enquête sur Youtube

→ Voir et télécharger des images brutes

→ Voir et télécharger des photos de l’enquête

→ Voir le rapport complet d’enquête (66 p.)

Contacts presse

1 Images tournées entre novembre et décembre 2019.
2 Étude menée pour la Fondation 30 Millions d’Amis par l’IFOP, du 15 au 16 janvier 2020 auprès d’un échantillon de 1 010 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus. Représentativité de l’échantillon assurée par la méthode des quotas.

Une exemplarité qui fait défaut

Les violations de la loi constatées à l’abattoir Sobeval sont d’autant plus inacceptables qu’au moment du tournage, le directeur de l’établissement, n’était autre que Gilles Gauthier, le président de la Fédération des industries et du commerce en gros des viandes (Fedev). Cette organisation fédère les entreprises et les syndicats représentatifs de la filière viande, en lien avec Interbev. Sa position centrale dans la filière viande est choquante au regard des pratiques cruelles et illégales en cours dans l’abattoir qu’il dirigeait.

L’abattage sans étourdissement : une pratique à interdire

Si l’abattage d’êtres sensibles est toujours source d’immenses souffrances, l’abattage sans étourdissement préalable est encore plus douloureux pour les animaux. De nombreuses institutions se sont érigées contre cette pratique. Ainsi, la Fédération des vétérinaires d’Europe la juge « inacceptable en toutes circonstances3 » et l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) considère qu’elle est « à éviter4 », en raison des souffrances nettement supérieures qu’elle engendre par rapport à un abattage standard (avec étourdissement). Pour le Conseil national de l’Ordre des vétérinaires : « tout animal abattu doit être privé de conscience d’une manière efficace préalablement à la saignée et jusqu’à la fin de celle ci5. » En novembre dernier, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a préconisé l’étourdissement obligatoire à l’instar de nombreux autres États-membres6. C’est aussi le sens de l’article 1er de la proposition de loi déposée en janvier par la sénatrice Esther Benbassa.

L214 a écrit aux autorités religieuses juives et musulmanes pour leur demander de condamner fermement les pratiques de l’abattoir Sobeval.

Municipales

L214 interpelle les candidats aux élections municipales, en leur demandant de se positionner sur un ensemble de mesures permettant d’améliorer les conditions d’élevage et de mise à mort des animaux d’élevage. Il leur est notamment demandé de bannir de toute commande publique les produits issus d’élevages intensifs ainsi que les produits animaux issus des pires pratiques d’abattage, dont l’abattage sans étourdissement, l’étourdissement au CO2 des cochons et la suspension des oiseaux avant étourdissement.

→ Découvrez les candidats ayant signé l’engagement « Une ville pour les animaux »

Contacts presse

3 Fédération des vétérinaires d’Europe, 2010. Avis sur l’abattage d’animaux sans étourdissement préalable. Disponible en ligne.
4 Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), 2004. Avis relatif au bien-être animal dans les principaux systèmes d’étourdissement et de mise à mort des grandes espèces commerciales d’animaux. p. 2. Disponible en ligne.
5 Conseil national de l’Ordre des vétérinaires, 2015. Communiqué de presse.
6 Conseil économique, social et environnemental (CESE), 2019. Les enjeux relatifs aux conditions d’élevage, de transport et d’abattage en matière de bien-être animal, p. 43. Disponible en ligne.