Nouvelle enquête dans le plus gros abattoir de chevaux de France

Peut-on tuer des animaux avec respect ?

L214 révèle aujourd’hui une nouvelle enquête* menée à l’abattoir « Viande Nature Jura », spécialisé dans l’abattage des chevaux. Cet abattoir est situé sur la commune d’Équevillon, dans le département du Jura.

Enquête diffusée par Konbini et présentée par Hugo Clément

→ Voir l’enquête diffusée par Konbini et présentée par Hugo Clément

Si les images sont profondément choquantes, elles montrent pourtant des pratiques globalement conformes à la réglementation, avec des cadences d’abattage modérées. Sur la vidéo, on peut voir les chevaux parqués dans l’écurie adjacente à la salle d’abattage ainsi que l’amenée au box d’immobilisation, l’étourdissement au matador (pistolet à tige perforante), la suspension puis la saignée des chevaux. Certains résistent et reçoivent des coups d’aiguillon électrique et de nombreux coups de bâton pour avancer. Difficile de parler de respect, de « bien-être » ou de protection animale quand on voit ces chevaux en proie à des convulsions, en train d’être égorgés suspendus par une chaîne. Ces images d’animaux à l’agonie exposent la violence inhérente aux abattoirs.

Abattoir de chevaux

Ces 3 dernières années, L214 a diffusé 10 enquêtes réalisées dans 10 abattoirs français.
Ces enquêtes ont dévoilé les pratiques routinières d’abattoirs de toutes tailles, et mettant à mort différentes espèces d’animaux : chevaux, vaches, veaux, cochons, moutons, poulets, chevreaux, agneaux, etc. À chaque diffusion, les réactions ont été extrêmement vives. Les vidéos d’enquête rendent concret le meurtre alimentaire qu’on évite habituellement de regarder en face.

Il est tentant de penser que ces abattoirs ne sont que des cas particuliers et que la souffrance qu’y éprouvent les animaux ne serait due qu’à des « bavures ». Ce 11e abattoir montre que la question de la conformité à la réglementation (que les citoyens ignorent le plus souvent) n’est pas le cœur du problème. C’est la question même de tuer les animaux et la violence qui en découle qui est choquante. Il suffit d’ailleurs de lister quelques méthodes d’« étourdissement » et de mise à mort autorisées par la réglementation pour se rendre compte de cette violence inhérente aux abattoirs :

  • Les méthodes mécaniques : percussion de la boîte crânienne (lésions graves et irréversibles au cerveau provoquées par la pénétration d’une tige perforante dans le crâne), broyage à vif, ou encore dislocation du cou.
  • Les méthodes électriques : électrocution par pinces électriques ou par bain d’eau électrifié.
  • Les méthodes de gazage : dioxyde de carbone, gaz inertes, monoxyde de carbone.

L214 demande au président de la République Emmanuel Macron la mise en œuvre d’une politique volontariste et ambitieuse afin de réduire d’au moins 25 % d’ici 2025 le nombre d’animaux tués dans les abattoirs français. Cet objectif va dans le sens d’un consensus autour de la nécessaire baisse de consommation de produits animaux, que ce soit du point de vue de la santé publique, de la lutte contre le réchauffement climatique ou du partage des ressources.

Sébastien Arsac, directeur des enquêtes de L214, déclare : « L’abattoir de chevaux d’Équevillon assure sur son site Internet que “le respect de l’animal est au centre de ses préoccupations”. Mais peut-on tuer les animaux avec respect ? Il suffit de regarder ces nouvelles images pour répondre à cette question. Dans les abattoirs, on tue à l’arme blanche des animaux qui ne veulent pas mourir.
Aujourd’hui en France, plus de 3 millions d’animaux sont abattus chaque jour, soit 2 400 animaux à la minute. La meilleure volonté et les meilleures réglementations du monde ne pourront jamais pallier la grave injustice que représente la production massive de viande, dont la consommation n’est pourtant pas indispensable sur le plan nutritionnel. Il est plus que temps de se donner des objectifs concrets pour limiter au maximum le nombre d’animaux tués dans les abattoirs. Nous devons sortir de l’ère des abattoirs. »

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* Les images ont été tournées sur 5 matinées d’abattage entre les mois d’août et novembre 2018. L’abattoir d’Équevillon est le plus gros abattoir de chevaux de France.

L’abattage des chevaux

En France, environ 13 000 chevaux ont été abattus en 2016. Plus de la moitié d’entre eux sont des chevaux de course réformés (jeunes chevaux non sélectionnés, chevaux blessés ou chevaux en fin de carrière). Pourtant, France Galop et Le Trot (les deux fédérations de courses) sous-entendent que les chevaux ne sont pas envoyés à l’abattoir, ils ont signé une charte qui spécifie notamment à la mesure 8 : « Assurer, tout au long de la vie des chevaux, les soins nécessaires, leur mort devant advenir dans des conditions décentes lorsqu’il n’existe pas de thérapies efficaces ou économiquement supportables. »

Cadence des abattages en France : 2 400 animaux tués chaque minute

Chaque jour en France, ce sont 3 millions d’animaux, soit 2 400 par minute, qui sont tués dans les abattoirs. Une écrasante majorité d’entre eux ont grandi dans des élevages intensifs. Ainsi, en France :

Une nécessaire réduction de la consommation de produits animaux

Réduire notre consommation de viande aura une implication directe sur le nombre d’animaux tués mais cela aura aussi des conséquences positives pour l’environnement et la santé publique, entre autres.

pour l’environnement

Une étude qui vient d’être publiée dans la célèbre revue scientifique Nature indique que les pays développés devront réduire de 90 % leur consommation de viande pour préserver la planète et nourrir les quelque 10 milliards d’humains qui devraient la peupler d’ici 2050. Les produits animaux tels que le lait sont plus polluants que leurs alternatives végétales. Ainsi, à titre de comparaison, une étude de juin 2018 démontre que la production d’un litre de lait de soja émet trois fois moins de gaz à effet de serre que celle d’un litre de lait de vache. Le GIEC estime que pour limiter le changement climatique, qui entraîne des catastrophes que nous ne faisons encore qu’entrevoir, il faut impérativement réduire notre consommation de produits issus des animaux.

pour la santé publique

Par ailleurs, de nombreuses études ont clairement établi les bienfaits pour la santé d’une réduction drastique de notre consommation de viande et, plus généralement, de produits issus des animaux. Selon un rapport de l’OMS s’appuyant sur 800 études, la viande transformée, comme la charcuterie, est « cancérogène pour l’homme » tandis que la viande rouge est « probablement cancérogène ». L’école de santé publique de Harvard recommande de limiter notre consommation de viande à 90 g par jour (nous en consommons actuellement 180 g). Autre effet négatif de l’élevage sur la santé : l’augmentation de l’antibiorésistance. L’usage massif d’antibiotiques dans les élevages contribue grandement à l’apparition de souches bactériennes résistantes. Enfin, l’élevage est responsable du déclenchement et du développement d’épizooties, telles que la grippe aviaire. Les systèmes modernes d’élevage sont des incubateurs à virus et bactéries, Listeria monocytogenes, salmonelles, Campylobacters, E. coli. Comme l’indiquait déjà un rapport de la FAO il y a 10 ans : « Il n’est pas surprenant que les trois quarts des nouveaux pathogènes ayant affecté les humains dans les dix dernières années proviennent des animaux ou des produits animaux. »

Une politique gouvernementale à l’opposé de l’intérêt général

Or,la France accélère sa politique de développement de la production (soutien à un modèle tourné vers l’export, appui à l’industrie de la pêche) et de la consommation (positions défavorables concernant l’augmentation de la part de protéines végétales dans l’alimentation, l’instauration d’une alternative végétarienne quotidienne ou d’un menu végétarien hebdomadaire dans la restauration collective et une absence de remise en cause de l’obligation de consommer des protéines animales à la cantine, ainsi qu’un appui à l’interdiction de l’usage des termes comme « steak » pour désigner des produits comportant des protéines végétales. Il en va de la responsabilité du président de la République d’amorcer une transition agricole et alimentaire afin de réduire le nombre d’animaux tués dans les abattoirs français.

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