Enquête dans un élevage de poules pondeuses Matines

Le 14/05/2018

L’interdiction des cages en discussion au Parlement la semaine prochaine

L214 rend publiques ce lundi les images choquantes d’un site d’élevage industriel de 460 000 poules pondeuses dans la Somme produisant des œufs pour Matines, premier producteur d’œufs français (3 milliards d’œufs par an).
Les images, tournées début avril, témoignent de la misère des conditions de vie de ces oiseaux : des dizaines de milliers de poules sont enfermées dans des centaines de cages empilées et alignées dans d’immenses bâtiments fermés. La promiscuité favorise les comportements d’agression et de piquage. Après seulement quelques mois dans les cages, l’état de santé des poules est dégradé, certaines sont fortement déplumées, d’autres agonisent piétinées par leurs congénères, de nombreuses sont mortes.

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Malgré ces conditions de vie abominables déjà maintes fois montrées, le député LR Thibault Bazin n’a pas hésité à défendre l’élevage en cage pendant l’examen du projet de loi en commission des affaires économiques le 19 avril dernier. Ses paroles contrastent fortement avec la réalité de ce qu’endurent les oiseaux.

→ Intervention du député en commission 03:28:15

Élevage de poules Matines

C’est le troisième élevage sous contrat avec Matines dont L214 révèle les images. En 2016, elles ont conduit à la fermeture d’un élevage de 200 000 poules élevées en cage dans l’Ain. En décembre 2017, Stéphane Bern invitait le président de la République à interdire l’élevage en cage en présentant la vidéo d’une enquête dans un hangar de 130 000 poules dans les Côtes-d’Armor.

En France, plus d’une centaine d’entreprises agroalimentaires ainsi que les principales enseignes de la grande distribution, de la restauration collective et de l’hôtellerie ont pris leurs responsabilités et se sont engagées à bannir les œufs de poules en cage de leur approvisionnement au plus tard en 2025. Le groupe d’aucy, producteur d’un milliard d’œufs chaque année, s’est quant à lui engagé à l’arrêt total des cages en 2025.

→ Engagements des entreprises

Via son site, L214 invite les internautes à solliciter le président de la République, au Premier ministre, au président de l’Assemblée nationale, au ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation, aux présidents de groupes politiques à l’Assemblée nationale et aux rapporteurs du projet de loi afin qu’ils inscrivent l’interdiction des cages dans la loi à l’occasion de l’examen du texte en séance publique à l’Assemblée nationale à partir du 22 mai.

→ Interpeller les élus

« La semaine prochaine, les députés seront appelés à voter pour ou contre l’interdiction des élevages en cage. Tout au long de cette semaine, nous leur mettrons sous les yeux la réalité de ce que vivent 33 millions de poules en France. L’interdiction de l’élevage des poules en cage est un impératif éthique dans une société qui prend la souffrance des animaux au sérieux. L’opinion publique y est largement favorable depuis longtemps et de nombreuses entreprises agroalimentaires se sont déjà engagées dans cette transition. Nous demandons au Parlement d’être aux côtés d’une société qui évolue, en mettant un point final à cette pratique aux conséquences désastreuses pour les animaux », déclare Brigitte Gothière, cofondatrice de L214.

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Label « Œufs de France » : 69 % de poules en cage

Les producteurs d’œufs viennent de lancer une vaste campagne de communication : « Œufs de France ». Quelle est la différence entre un œuf français et un œuf provenant d’un autre pays européen ? Aucune, ni pour les poules, ni pour les consommateurs, si ce n’est une plus grande probabilité que ce soit un œuf de poule en batterie. En effet, sur 48,6 millions de poules pondeuses en France, 69 % (soit 33,6 millions) sont détenues dans des cages pendant un an avant d’être jugées inutiles et envoyées à l’abattoir. En Europe, la moyenne est à 58 % et de plus en plus de pays européens s’engagent à interdire l’élevage en cage à moyen terme : cette interdiction sera effective en Autriche en 2020 et en Allemagne en 2025. En Suisse, l’élevage en cage est interdit depuis fin 1991.
Inutile également de mettre en avant les contrôles en France, Le Canard enchaîné révélait dans son édition du 16 août 2017 que seuls 677 œufs sur 14,3 milliards avaient été contrôlés en 2016. Pas de quoi faire cocorico.

Les Français favorables à l’interdiction totale

Aujourd’hui, 90 % des Français se montrent favorables à l’interdiction de l’élevage en cage des poules pondeuses (sondage YouGov 2018), soit 32 points de plus qu’en 2013 (sondage OpinionWay 2013).
L’arrêt de l’élevage en cage des poules pondeuses a été plébiscité par le public lors des consultations des États généraux de l’alimentation (second dans le TOP 10 des propositions des organisations).
21 organisations de défense des animaux et un collectif d’universitaires, d’artistes et de personnalités ont demandé au président de la République que l’interdiction totale de l’élevage des poules en cage soit inscrite dans la loi qui sera présentée au Parlement à partir du 22 mai.
En France, seule une poignée de producteurs d’œufs de poules élevées en cage sont favorables à ce type d’élevage… Ils sont malheureusement un lobby puissant.

Les filières à la manœuvre

La disparition des élevages de poules en cage est une promesse de campagne du candidat Macron, renouvelée à Rungis en octobre 2017 en tant que président de la République. Un amendement (CD256) a même été déposé en ce sens par la majorité lors de l’examen en commission du développement durable. Le gouvernement fait cependant marche arrière et refuse d’inscrire une interdiction dans la loi : il invoque le plan de filière et sa confiance dans les déclarations des interprofessions.

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Faire confiance à la profession ?

Flash-back : en 2012, la filière a investi massivement dans les cages alors que les indicateurs étaient clairs sur l’impasse de cette production à moyen terme (engagements institutionnels ou privés dans les autres pays européens et mise en demeure de la France par la Commission européenne de respecter la décision prise en 1999 d’interdire les cages « non aménagées »).

Plan de filière ?

Dans le plan proposé par la filière suite aux États généraux de l’alimentation, il est lucidement noté que l’interprofession « n’est pas directement ouverte aux problématiques de l’aval ». En d’autres termes, la filière ne prend pas en compte les évolutions de ses parties prenantes (entreprises clientes, consommateurs).
Pourtant, les professionnels eux-mêmes reconnaissent le rejet massif des œufs de poules en cage de la part des consommateurs. Ils indiquent ainsi, dans leur plan de filière, qu’à horizon 2022 :
– « la demande pour les segments “coquille” sera largement en faveur des productions alternatives,
– environ 50 % des ovoproduits français seront fabriqués à partir d’œufs alternatifs. »
Autrement dit, les professionnels prévoient que, à l’horizon 2022, 75 % de la demande sera sur des œufs hors cage, mais maintiennent un objectif de seulement 50 % de poules en élevages alternatifs d’ici à 2022.

Le chantage à l’emploi

69 % de la production totale d’œufs est issue d’élevages en cage et représente 380 exploitations. La production restante (soit 31 %, en élevages dits « alternatifs ») représentent 1 660 exploitations, selon le Centre national de promotion de l’œuf (CNPO). La production d’œufs de poules dans des élevages dits « alternatifs » génère entre 3 et 6 fois plus d’emplois que lorsqu’elle est issue d’élevages en cage (Institut technique de l’aviculture, 2015, p. 10). L’interdiction des cages est donc une mesure favorable à l’emploi.

Vote au Parlement à partir du 22 mai

Après examen en commission des affaires économiques, le projet de loi Agriculture : équilibre des relations commerciales dans le secteur agroalimentaire contient un chapitre nommé « Respect du bien-être animal », vide de mesures sur les conditions de vie, de transport ou de mise à mort des animaux.
Les amendements favorables aux animaux déposés lors de l’examen en commission en avril dernier ont tous été rejetés par le Rapporteur et le ministre de l’Agriculture.
D’autres amendements seront proposés en séance publique, qu’il s’agisse de l’élevage en cage des poules pondeuses, du contrôle vidéo en abattoir ou de la végétalisation de l’alimentation. Nous espérons que les images que nous dévoilerons cette semaine et la mobilisation citoyenne amèneront les députés et les sénateurs à prendre des décisions basées sur l’éthique, le bon sens et l’écoute des citoyens plutôt que de rester dans un statu quo dicté par des filières d’élevage visiblement dépassées par l’évolution des attentes sociétales.

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