Nouvelle enquête dans 4 élevages de poules pondeuses

L214 dévoile une nouvelle enquête menée fin février dans 4 élevages différents de poules pondeuses. Aucun de ces élevages n’est conforme à la nouvelle réglementation entrée en vigueur le 1er janvier 2012. Vu la taille des élevages, ce sont des dizaines de milliers d’œufs produits en infraction avec la réglementation qui se retrouvent chaque jour sur le marché. L214 porte plainte.
La filière a annoncé la mise en place pour fin mars d’une nouvelle mention « œuf pondu en France » sur les étiquettes. Il n’y a pourtant pas de quoi être fier du modèle d’élevage avicole français qui se place parmi les mauvais élèves de l’Union européenne.

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Résultat de l’enquête menée fin février 2012

Dans un des élevages, aucun des « enrichissements » obligatoires depuis le 1er janvier (perchoir, nid, bac à litière, raccourcisseur de griffes) n’est installé. Pire, les densités d’élevage ne sont même pas conformes à une réglementation précédente qui devait s’appliquer en 1995, il y a donc 17 ans1 ! L214 a porté plainte auprès du Tribunal de grande instance compétent.
Dans les 3 autres, une partie des « enrichissements » obligatoires sont manquants. L214 porte plainte contre la France auprès de la Commission européenne pour mauvaise application de la directive de protection des poules pondeuses et contrôles inefficaces.

Œufs illégaux sur le marché

Vu la taille de ces élevages, ce sont des dizaines de milliers d’œufs produits en infraction avec la réglementation en vigueur qui se retrouvent chaque jour sur le marché.
Trois de ces élevages livrent leurs œufs au groupe CECAB qui les commercialise sous la marque Matines et Mas d’Auge pour les œufs coquilles, marque ABCD pour les ovoproduits ou marque ABCD ou Karea pour les produits élaborés.
En novembre 2011, le CNPO (Interprofessionnelle de l’œuf) assurait que 100% des élevages français seraient aux normes au 1er janvier 20122.

Une nouvelle mention « œuf pondu en France »

Le CNPO a annoncé la mise en place d’une nouvelle mention « œuf pondu en France » pour la fin mars. Il n’y a pourtant pas de quoi être fier du mode de production avicole français. La France fait pire que la moyenne européenne en matière de système de production. Dans l’Union européenne à 27, les systèmes hors cages (bio, plein air ou au sol) représentent 35% du cheptel contre 22% en France. La part des systèmes alternatifs est majoritaire en Allemagne, au Royaume-Uni, en Suède, en Autriche et aux Pays-Bas3.
L’enquête dévoilée par L214 montre de plus que la mention « pondu en France » ne garantit en rien un respect de la réglementation européenne.

Pénurie d’œufs et bien-être des poules

Une pénurie d’œufs et son corollaire, l’augmentation du prix, ont été constatées sur le marché français en début d’année.
Les éleveurs devant modifier les cages et donc interrompre momentanément la production, la directive pour la protection des poules pondeuses est rendue responsable de cette augmentation4. L’argument est irrecevable :

  • La directive date de 1999. Le producteurs ont disposé de 12 ans pour opérer la transition : largement de quoi être prêts dans les temps. Fin 2010, une résolution du Parlement européen tirait déjà la sonnette d’alarme : « le non-respect de la directive 1999/74/CE peut entraîner un risque de pénuries d’œufs et d’augmentations considérables des prix à la consommation »5.
  • Le coût de l’alimentation compte pour 60% dans le prix de production d’un œuf. C’est avant tout l’augmentation du prix du blé et du maïs qui entraîne celle du prix des œufs6. D’autre part, l’incidence des mises aux normes entraînent une augmentation ponctuelle allant de 0.5 à 8% par oeuf, loin des 75% sur le prix du marché coté !7
  • En France, la production d’œufs repose principalement sur l’élevage en batterie. C’est pourquoi l’application de normes minimales de protection des animaux entraîne des changements pour la majeure partie des exploitations. La situation actuelle est donc la conséquence de ce modèle agricole qui a donné priorité à l’élevage intensif. À titre de comparaison, en France, presque 8 poules sur 10 sont élevées dans des cages en batterie, contre moins de 4 sur 10 en Allemagne.

La responsabilité des supermarchés français

C’est dans les pays où des chaînes de supermarchés ont pris l’engagement de ne plus vendre d’œufs issus d’élevage de batterie que la production alternative est la plus développée. En France, à ce jour, aucune enseigne n’a pris la décision de renoncer à la commercialisation d’œufs de cages.
L214 a décidé de mener une campagne active pour encourager les grandes surfaces à faire évoluer le marché. Parce que Monoprix fonde sa communication sur le développement durable, 82 opérations de sensibilisation ont été menées depuis octobre 2011 devant les magasins de l’enseigne dans toute la France et 14 000 cartes-pétitions ont été envoyées à la direction du groupe.

1- Directive 88/166/CEE établissant les normes minimales relatives à la protection des poules pondeuses en batterie
2- « Directive bien-être pondeuses : la France, à l’heure ! », Filières Avicoles, p36 décembre 2011.
3- P. Magdelaine, V. Gonnier, C. Jez, « Situations, perpectives et enjeux pour les filières œufs européennes à la veille de la mise en œuvre de la directive bien-être », Neuvièmes journées de la recherche avicole, Tours, 29 et 30 mars 2011.
4- « Une directive européenne fait monter le prix des oeufs », Nord Eclair, 12 mars 2012.
5- Résolution du Parlement européen du 16 décembre 2010 sur l’industrie des poules pondeuses au sein de l’Union européenne – interdiction de l’utilisation de cages non aménagées à partir de 2012
6- Laetitia Van Eeckhout, « Les producteurs d’oeufs sont étranglés par la flambée des cours des céréales », Le Monde, 26 août 2011, p15. « Les producteurs d’oeufs subissent la flambée des cours des céréales nécessaires à l’alimentation de leurs poules. [[…]] leurs coûts de production ont progressé de 23 % en un an. »
7- « Pénurie, coût et mises aux normes », L214, mars 2012.


À propos de L214

L214 est une association de protection animale centrée sur les animaux utilisés dans la consommation alimentaire (viande, lait, œufs, poisson).
Elle articule son travail sur 3 axes complémentaires :

  • Rendre compte de la réalité des pratiques les plus répandues, les faire évoluer par des campagnes d’information et de sensibilisation. Repérer et tenter de faire sanctionner les pratiques illégales par des actions en justice. Travailler à l’évolution de la réglementation.
  • Démontrer l’impact négatif de la consommation de produits animaux (terrestres ou aquatiques) et proposer des alternatives : diminution de la consommation, refus des produits issus de l’élevage intensif et promotion de l’alimentation végétarienne.
  • Nourrir le débat public autour de la place accordée aux animaux.