Fermeture temporaire de l’abattoir du Boischaut

Le 03/11/2018

Fermeture temporaire de l’abattoir du Boischaut

Dépasser le cas particulier

Suite à notre enquête dans l’abattoir du Boischaut (Indre), le ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation condamne des « pratiques inacceptables ». Il demande au Préfet de « suspendre immédiatement » l’activité de l’abattoir et exige une enquête administrative.

Le ministre de l'Agriculture demande la fermeture temporaire de l'abattoir

Une réaction immédiate à ces images ne doit pas masquer la politique qu’attendent les Français du gouvernement sur les 1000 abattoirs qui abattent chaque jour 3 millions d’animaux en France, dans des conditions qui accentuent les souffrances qu’ils endurent au moment de leur mise à mort. Un audit de 2016 montrait que 80% des chaînes d’abattage des animaux de boucherie présentaient des non-conformités. Pourtant, les infractions commises dans les abattoirs aujourd’hui ne donnent lieu à aucune conséquence, sauf si une caméra clandestine a pu saisir quelques instants d’activité.

→ Communiqué de presse de l’enquête de L214

→ Voir la vidéo d’enquête

→ Communiqué de presse du Ministère de l’Agriculture

Contacts presse :
Sébastien Arsac : 06 17 42 96 84
Brigitte Gothière : 06 20 03 32 66
Isis La Bruyère : 07 82 59 49 79

Une fermeture temporaire

L’enquête montre de graves manquements à la réglementation (structures et matériels défaillants, mauvais traitements et sévices graves envers les animaux, hygiène déplorable…). Avec la suspension de l’activité de l’abattoir, la préfecture et le gouvernement constatent implicitement qu’il existe une violation de la loi encadrant les conditions de mise à mort des animaux. Il s’agit également d’une reconnaissance du sérieux du travail de L214 en tant que lanceur d’alerte.

→ Voir le rapport complet de cette enquête

→ Voir le rapport d’inspection des services vétérinaires de 2016

Un « sujet prioritaire du gouvernement » ?

François de Rugy, ministre d’état, ministre de la Transition écologique et solidaire, souhaite « contrôler les abattoirs en continu » pour mettre fin à ces pratiques.

Plus de 3 ans après les images de l’abattoir d’Alès, plus de 2 ans après un audit accablant montrant que 80% des chaînes d’abattage présentaient des non-conformités, la situation dans les abattoirs est identique, alors que les ministres en charge ont tous fait de la lutte contre la maltraitance animale une priorité de leur politique.
Si on peut saluer la réaction rapide du ministre sur ce cas particulier, ce sont bien des mesures concrètes pour tous les abattoirs qui sont attendues aujourd’hui, soit une réponse à la hauteur des enjeux dans des abattoirs où les infractions à la réglementation leur causent des souffrances supplémentaires évitables. Ces infractions ne sont parfois pas détectées, souvent non corrigées et dans tous les cas jamais sanctionnées de façon dissuasive.

Dans l’abattoir du Boischaut, les infractions sont connues depuis plus de deux ans : aucun changement dans l’abattoir, aucune sanction, aucun procès… L’abattoir a continué de fonctionner comme si ce contrôle n’avait jamais eu lieu. Les abattoirs de Houdan et de Limoges avaient fait de même. Combien d’enquêtes faudra-t-il pour que cette priorité se transforme en politique ambitieuse ?

Des mesures concrètes

Les propositions concrètes existent depuis longtemps mais aucun gouvernement ne s’en est saisi. Lors du projet de loi Alimentation, des mesures ont été proposées pour :
– renforcer les contrôles en abattoir (contrôle vidéo obligatoire, surveillance continue des postes d’abattage, publication des rapports…)
– supprimer les pratiques les plus cruelles (abattage sans étourdissement, suspension des animaux encore conscients, étourdissement au CO2…)
En 2016, la Commission d’enquête sur les conditions d’abattage, présidée par M. Olivier Falorni, avait elle-même proposé 65 mesures. Une seule a été reprise, le Comité national d’éthique des abattoirs (CNEAb).

Intégrer L214 au CNEAb ?

Le Comité national d’éthique des abattoirs (CNEAb) est un groupe de concertation mis en place afin, théoriquement, de débattre de « l’évolution de la législation et de la réglementation relatives à la protection animale en abattoir ». Cette instance réunit différents acteurs professionnels et institutionnels dont des associations de protection animale. À l’origine de la création de ce comité, L214 en a été d’emblée exclue, son entrée étant bloquée par certains lobbies ayant pour objectif de rassurer les consommateurs, pas d’être à l’écoute d’une demande sociétale grandissante, soucieuse des conditions de mise à mort des animaux. Le CNEAb pourrait être un espace de dialogue et de réflexion à condition qu’il intègre l’ensemble des parties prenantes. L’association L214, forte de son expertise, est prête à y contribuer.

Ainsi, un courrier a été envoyé au premier ministre afin de réitérer la demande auprès du gouvernement pour intégrer ce groupe de concertation, œuvrer ensemble à renforcer les contrôles et les sanctions et faire reculer les pires pratiques, comme nous l’avons fait autour du projet de loi Alimentation.

→ Courrier à l’attention du premier ministre

Prendre de la hauteur

Il est aujourd’hui indispensable de faire évoluer les conditions d’abattage des animaux afin de réduire leurs souffrances dans leurs derniers instants. Néanmoins, il ne faut pas esquiver la question de fond : nous tuons brutalement chaque jour des millions d’animaux sans nécessité. Au XXIe siècle, n’est-il pas temps de sortir de l’ère des abattoirs ? Au-delà de la question éthique — suffisante en elle-même — des scientifiques nous ont également alerté sur l’urgence écologique en nous rappelant que si nous voulons être à la hauteur des enjeux environnementaux, il nous faut, en France, réduire notre consommation de viande de 90%.

Dans ce contexte, le gouvernement devra être à l’écoute de ces enjeux tout en associant l’ensemble des parties prenantes, condition ultime pour rétablir la confiance accordée par les citoyens aux acteurs politiques, sociaux et économiques. Il ne doit pas laisser le sort des animaux d’élevage (et le nôtre) au bon vouloir des filières.

Contacts presse :
Sébastien Arsac : 06 17 42 96 84
Brigitte Gothière : 06 20 03 32 66
Isis La Bruyère : 07 82 59 49 79