Leur vie commence avec la séparation brutale d’avec leur mère, déchirement pour l’un comme pour l’autre.
La plupart des femelles renouvelleront le cheptel tandis que les mâles seront engraissés avant d’être abattus, le plus souvent dans des élevages industriels, intégrés à de grands groupes laitiers.
Mais pourquoi leur chair est-elle si blanche ?
Pourquoi tant de veaux ?
En 2017, 1,2 million de veaux nés de vaches laitières ont été élevés en France1. Parmi eux, 85 % sont des mâles2, et 85 % sont élevés dans des ateliers industriels spécialisés3.
Si tant de veaux sont issus de la filière laitière, c’est parce que pour produire du lait, les vaches, qui sont des mammifères, doivent donner naissance à un veau chaque année.
De faible valeur marchande, considérés comme des « sous-produits » de la production de lait, ils sont alors engraissés pour leur chair dans des élevages de « veaux de boucherie ».
À l’échelle mondiale, la France est le 2e producteur et le 1er consommateur de viande de veau4. 40 % de la « production » française est réalisée en Bretagne5.
La séparation mère-petit
Au plus tard 24 h après leur naissance, les veaux laitiers sont séparés de leur mère. Après la séparation, beaucoup se cherchent en meuglant pendant des jours. Des vaches ont défoncé des clôtures et parcouru des kilomètres pour retrouver leur petit, parfois au péril de leur vie.
→ En savoir plus sur la vie des vaches laitières
Élevage en claustration
Les veaux nés de l’industrie du lait passent les premières semaines de leur vie seuls dans des cases individuelles, souvent à peine plus grandes que leur corps.
À l’âge de de 8 à 15 jours, ils sont envoyés dans des élevages d’engraissement spécialisés6.
Là, ils restent généralement quelques semaines en box individuels, puis sont parqués en groupes de plusieurs veaux (le logement en groupe est obligatoire à partir de 8 semaines7). Dans 91 % des cas, ils sont élevés en bâtiments fermés sur un sol dur sans litière, en bois ou en béton : le caillebotis. Dans seulement 9 % des cas, ils sont élevés sur paille8.
Loin de leurs mères, ils sont principalement nourris d’un lait en poudre de substitution, constitué notamment des déchets de l’industrie laitière (lactosérum), d’huile de palme et d’additifs.
Afin de répondre aux habitudes des consommateurs, ils sont volontairement anémiés pour que leur chair soit claire. Le minimum légal d’apport en fer dans leur alimentation9 est en effet bien en dessous des recommandations de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA)10.
Mourir jeune
Les veaux laitiers sont généralement envoyés à l’abattoir à l’âge de 5-6 mois en France, et jusqu’à 8 mois en Europe pour l’appellation « veau de boucherie »11, alors même que d’après les observations en refuges, les bovins peuvent vivre jusqu’à environ 20 ans.
À l’abattoir, ils sont souvent confrontés à des équipements inadaptés à leur petite taille, comme à l’abattoir de Mercantour. Ils sont alors mal immobilisés, et peuvent faire les frais d’un étourdissement moins efficace, se retrouvant parfois tués en pleine conscience.
→ En savoir plus sur l’abattage des animaux
Longs transports
Parce qu’il est parfois plus rentable de les engraisser ailleurs que dans leur pays de naissance, 1,3 million de jeunes veaux ont été transportés en 2018 d’un pays à un autre de l’Union européenne12, effectuant des trajets éreintants de plusieurs jours. Par exemple, des veaux nés en Irlande sont engraissés aux Pays-Bas en transitant par la France.
Il n’existe aucune limite à la durée totale de ces longs trajets, qui peuvent durer autant de périodes de 19 heures que voulu, entrecoupées de périodes de déchargement de 12 ou 24 h13. Les jeunes animaux, épuisés, se retrouvent fréquemment assoiffés et affamés à leur arrivée dans l’élevage de destination.
→ En savoir plus sur le transport des animaux
Voir aussi :
Références
1 FranceAgriMer, 2019. Les marchés des produits laitiers, carnés et avicoles – Bilan 2018, Perspectives 2019, 150 p. (p. 33-34). Disponible en ligne.
2 Ellies M.-P., Bordeaux Sciences Agro, 2014. Les filières animales françaises, caractéristiques, enjeux et perspectives, Chapitre 4 – Veaux. Tec et doc, éditions Lavoisier, coll. Synthèse agricole, 527 p. (p. 119-120).
3 « Le bien-être et la protection des veaux », Ministère de l’agriculture et de l’alimentation, article du 5 juin 2019, [[En ligne]].
4 Interbev, 2017. Plan de la filière veau française, 19 p. (p. 7). Disponible en ligne.
5 « La filière veau de boucherie bretonne évolue », Terragricoles de Bretagne, article du 24 mai 2019, [[En ligne]].
6 « Le bien-être et la protection des veaux », Ministère de l’agriculture et de l’alimentation, article du 5 juin 2019, [[En ligne]].
7 Directive 2008/119/CE du Conseil du 18 décembre 2008 établissant les normes minimales relatives à la protection des veaux. Disponible en ligne.
8 Idele, Interbev, 2019. Repères techniques et économiques en élevages de veaux de boucherie – campagne 2017-2018, 8 p. (p. 4). Disponible en ligne.
9 Directive 2008/119/CE du Conseil du 18 décembre 2008 établissant les normes minimales relatives à la protection des veaux. Disponible en ligne.
10 EFSA, 2012. Scientific Opinion on the welfare of cattle kept for beef production and the welfare in intensive calf farming systems, 166 p. (p. 102-103). Disponible en ligne.
11 Ellies M.-P., Bordeaux Sciences Agro, 2014. Les filières animales françaises, caractéristiques, enjeux et perspectives, Chapitre 4 – Veaux. Tec et doc, éditions Lavoisier, coll. Synthèse agricole, 527 p. (p. 119).
12 FranceAgriMer, 2019. Commerce extérieur. Échanges dans les filières bovine-ovine vifs, données du mois de janvier 2019, 35 p. (p. 23). Disponible en ligne.
13 Règlement (CE) no 1/2005 du Conseil du 22 décembre 2004 relatif à la protection des animaux pendant le transport et les opérations annexes. Disponible en ligne.