La grande majorité des poulets de chair sont envoyés à l’abattoir à l’âge de 35 jours ou de 45 jours1. Quelle que soit la manière dont ils ont été élevés, tous subiront la même violence : des manipulations brutales, un transport dans des caisses exiguës, et une mort douloureuse. Le processus d’abattage le plus couramment utilisé cause des luxations pour près de la moitié des poulets et des fractures pouvant concerner 8 % d’entre eux2,3.
Filière | Âge d’abattage (jours) | Part de la production (%) | |
---|---|---|---|
Standard | 35 | 45a | 72 % |
Export | 32 | 7 % | |
Certifiés | 56 | 5 % | |
Bio & Label Rouge | 88 | 14 % | |
a Poulets lourds |
Avant la mort, la brutalité insoupçonnée du « ramassage »
Pour pouvoir être envoyés à l’abattoir par camion, les poulets sont d’abord attrapés et entassés dans des caisses : c’est le ramassage. Un moment particulièrement stressant pour les oiseaux. Il est généralement effectué par des sociétés spécialisées, soit directement à la main, soit par une machine. Dans ce cas, les oiseaux sont engloutis à grande vitesse par une « moissonneuse à poulets », convoyés par tapis roulant, puis propulsés brutalement dans les caisses.
Les jeunes oiseaux endoloris ou blessés sont alors entassés à 10-12 ou 30-33 par tiroir (selon leur poids et le modèle utilisé), sans pouvoir bouger5. Le trajet qui mène à l’abattoir peut durer plusieurs heures. La réglementation autorise le transport des poulets jusqu’à 12 h consécutives sans eau ni nourriture…
L’électronarcose par bain d’eau, une méthode d’abattage hautement décriée
Une fois à l’abattoir, les poulets sont manipulés tout aussi brutalement. En France, l’électronarcose par bain d’eau est la méthode d’étourdissement la plus répandue dans les abattoirs de volailles. Hautement décriée6, cette pratique nécessite d’accrocher les oiseaux encore conscients par les pattes.
Les poulets se retrouvent tête en bas, suspendus à des crochets métalliques avançant sur un rail (la chaîne d’abattage). Cet accrochage en pleine conscience provoque un énorme stress et des douleurs considérables. Les douleurs sont liées à la pression exercée sur les pattes, à l’entrave des membres et à la position tête en bas. Comme pour le ramassage, l’INRA souligne que les fractures, les luxations et les hémorragies sont fréquentes lors de cette opération7. L’EFSA précise que ce processus peut causer des luxations des pattes ou des ailes à 50 % des oiseaux, et des fractures pour 1 à 8 % d’entre eux8.
Suite à cette étape, la tête des oiseaux est immergée dans un bain d’eau électrifié censé provoquer la perte de conscience. Les poulets sont ensuite saignés par une lame automatique (ou au couteau, voire aux ciseaux dans les plus petites structures). Dans certains cas, l’intensité du courant est trop faible pour rendre les poulets inconscients. Ils sont alors saignés en pleine conscience. Ce choix peut être effectué, en toute illégalité, afin d’éviter l’éclatement de vaisseaux sanguins et ainsi garantir une meilleure qualité de la viande9.
Depuis 2014, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) recommande de cesser l’usage de cette méthode au profit d’autres techniques d’étourdissement10, comme l’étourdissement au CO211, jugé moins nocif pour les oiseaux. Il évite l’accrochage des oiseaux encore conscients, qui les soumet à des douleurs considérables. Cela entraîne de fait moins de manipulations donc autant d’os brisés ou de luxations évités.
Les abattages rituels, avec ou sans étourdissement ?
En France, les abattages rituels (halal ou casher) des gros animaux tels que les bovins ou les moutons sont le plus souvent réalisés sans étourdissement préalable avant la saignée.
Ce n’est par contre pas le cas pour les volailles. Selon AVS, un label de certification halal, 90 % des volailles abattues rituellement sont étourdies par électronarcose avant la saignée (c’est-à-dire comme en abattage standard)12.
La cérémonie des Kapparot
Dans la tradition juive, le rite des Kapparot est parfois accompli en préparation de la fête de Yom Kippour. Il consiste à faire tourner un poulet trois fois au-dessus de sa tête puis à l’égorger à vif en récitant le texte approprié.
Ici des images de ce rituel pratiqué en France (enquête L214, 2016) :
Cette tradition cruelle est encore pratiquée chaque année en France, alors qu’en Israël, pays majoritairement juif, le gouvernement incite les croyants à remplacer les mises à mort de poulets par des dons d’argent aux plus démunis.
En savoir plus sur les méthodes d’abattage en France
Lire « Dans le crâne d’un tueur », témoignage d’un employé d’un abattoir de poulets
- 35 jours à 45 jours pour les poulets élevés de manière standard, 32 jours pour les poulets destinés à l’export, 56 jours pour les poulets certifiés, 88 jours pour les poulets bio et Label rouge.
ITAVI (Institut technique des filières avicole, cunicole et piscicole), 2022. Performances techniques et coûts de production en volailles de chair : résultats 2021, 35 p.
et
MSA (Mutuelle santé agricole), 2018. Le travail de l’éleveur de poulets de chair : déterminants et impacts sur la santé, 48 p. (p. 11). - Mota-Rojas, M.J. et al., 2008. « Welfare at Slaughter of Broiler Chickens: A Review », Journal of Poultry Science, vol. 7 n° 1, 5 p.
- EFSA (Autorité européenne de sécurité des aliments), 2014. « Scientific Opinion on Electrical Requirements for Poultry Waterbath Stunning Equipment », EFSA Journal, vol. 12 n° 7, 18 p.
- 35 jours à 45 jours pour les poulets élevés de manière standard, 32 jours pour les poulets destinés à l’export, 56 jours pour les poulets certifiés, 88 jours pour les poulets bio et Label rouge.
ITAVI (Institut technique des filières avicole, cunicole et piscicole), 2022. Performances techniques et coûts de production en volailles de chair : résultats 2021, 35 p.
et
MSA (Mutuelle santé agricole), 2018. Le travail de l’éleveur de poulets de chair : déterminants et impacts sur la santé, 48 p. (p. 11). - Mota-Rojas, M.J. et al., 2008. « Welfare at Slaughter of Broiler Chickens: A Review », Journal of Poultry Science, vol. 7 n° 1, 5 p.
- EFSA (Autorité européenne de sécurité des aliments), 2014. « Scientific Opinion on Electrical Requirements for Poultry Waterbath Stunning Equipment », EFSA Journal, vol. 12 n° 7, 18 p.
- Goualan, N., 2022. « Réduire le taux d’ailes cassées à l’abattoir », Paysan Breton.
- Chambres d’agriculture des Pays de la Loire, 2013. Enquête sur le ramassage des volailles, 24 p (p. 15-16).
- EFSA (Autorité européenne de sécurité des aliments), 2014. « Scientific Opinion on Electrical Requirements for Poultry Waterbath Stunning Equipment », EFSA Journal, vol. 12 n° 7, 18 p.
- INRA (Institut national de la recherche agronomique), 2009. Douleurs animales : les identifier, les comprendre, les limiter chez les animaux d’élevage, 342 p.
- EFSA, 2014. « Scientific Opinion on Electrical Requirements for Poultry Waterbath Stunning Equipment », EFSA Journal, vol. 12 n° 7, 18 p.
- CIWF, 2016. « L’abattage des poulets de chair », CIWF recherche, mai 2016, 9 p. (p. 1).
- EFSA, 2014. « Scientific Opinion on Electrical Requirements for Poultry Waterbath Stunning Equipment », EFSA Journal, vol. 12 n° 7, 18 p. (p. 2)
- EFSA Panel on Animal Health and Welfare (AHAW) et al.., 2019. « Slaughter of animals: poultry », EFSA Journal, vol. 17 n° 11, 91 p. (p. 26).
- Belghiti L., 2010. « Les dessous du halal : abattage rituel, électronarcose, assommage, qu'en est-il ? », Saphir News [Entretien avec Fethallah Otmani, directeur administratif de l’association AVS, label de certification halal].