Le 14/10/2015
L’agonie des chevaux, cochons, moutons et bovins mise au jour
L’association L214 dévoile aujourd’hui une enquête vidéo accablante sur l’abattoir régional d’Alès. Jamais en France, la mise à mort des animaux dans un abattoir n’avait été montrée de façon aussi transparente et détaillée.
Les images, publiées ce matin sur le site du Point, sont difficilement soutenables. Elles montrent des chevaux assommés au pistolet à tige perforante. Certains, mal étourdis, reprennent conscience sur la chaîne d’abattage. Les cochons sont gazés. Pour la première fois au monde, une caméra descend avec eux dans la fosse à CO2 et montre leur violente asphyxie. Les moutons sont égorgés en pleine conscience dans un tonneau rotatif avec pleine vue sur la salle où sont découpés leurs congénères. Les images montrent aussi la mise à mort des bovins avec ou sans étourdissement. Des bovins mal étourdis et retrouvant leur sensibilité sont égorgés à même le sol ou sont suspendus par une patte. Les bovins non étourdis sont massacrés au couteau et agonisent pendant de longues minutes.
Une vidéo de synthèse commentée par l’actrice Hélène de Fougerolles est diffusée sur le site dédié à cette enquête : Abattoir made in France.
Afin de montrer l’ampleur de l’enquête filmée sur une dizaine de jours, le site diffuse également plusieurs vidéos comprenant des séquences complètes sur l’abattage des chevaux, des cochons, des moutons, des bovins avec étourdissement et des bovins sans étourdissement.
Dans le rapport d’expertise qu’il a rédigé suite au visionnage des images, le Pr. Mouthon — Docteur – Vétérinaire, expert près les Cours administratives d’appel de Paris et de Versailles, expert près la Cour d’appel de Versailles, agréé par la Cour de cassation — confirme les constatations de l’association et souligne les risques sanitaires présents dans cet abattoir. Les pratiques de mise à mort et les équipements contreviennent à la réglementation. Les services vétérinaires semblent absents ou non concernés par les graves défaillances constatées.
En mai 2015, l’association L214 avait sollicité l’abattoir pour effectuer une visite. Le maire Max Roustan avait alors refusé la visite affirmant que :
« L’abattoir municipal d’Alès a à coeur de respecter de façon rigoureuse les dispositifs limitant au maximum la souffrance des animaux, sous le contrôle strict et quotidien des services de l’État. »
L’abattoir d’Alès fournit les boucheries locales, mais aussi des collèges, des lycées et des hôpitaux.
Devant la gravité des faits, l’opacité et le déni affiché, L214 a décidé de porter à la connaissance des consommateurs la réalité des pratiques.
L’association porte plainte pour cruauté contre cet abattoir auprès du tribunal de grande instance d’Alès et demande une fermeture administrative et immédiate. En parallèle, L214 lance une pétition sur la plateforme Change.org pour appuyer cette demande de fermeture.
→ Voir la pétition Stop à la cruauté à l’abattoir d’Alès
Brigitte Gothière, porte-parole de L214 : « Les abattoirs sont une véritable boîte noire tenue à l’écart du public. Pourtant nous avons le droit de savoir. Derrière les murs de l’abattoir d’Alès se produit un carnage quotidien, d’une effroyable cruauté envers les animaux. L214 demande la fermeture immédiate de l’abattoir, et invite chacun à réfléchir à sa propre consommation de viande et de ce qu’elle implique pour les animaux. »
Contacts presse :
Brigitte Gothière : 06 20 03 32 66 (Paris)
Sébastien Arsac : 06 17 42 96 84 (présent à Alès)
Des images routinières, un abattoir d’envergure régionale
L’abattoir d’Alès est un abattoir régional municipal. 3000 chevaux, 20 000 cochons, 40 000 moutons et 6 000 bovins y sont tués chaque année. C’est le plus gros abattoir de la région.
Avec plus de 50 heures de tournage sur une dizaine de jours entre avril et mai 2015, les images de l’enquête donnent un aperçu fidèle des conditions de fonctionnement usuelles de l’abattoir.
Des chevaux reprennent conscience
De nombreux chevaux refusent de rentrer au poste d’étourdissement, certains reçoivent des coups de bâton, d’autres se cognent à la porte du box qui se referme sur eux. L’immobilisation de la tête des chevaux, réalisée d’une main, ne permet pas à l’employé d’ajuster précisément le tir du pistolet à tige perforante. Le laps de temps entre l’étourdissement et la saignée est trop long, généralement supérieur à 41 secondes, limite préconisée par l’Autorité européenne de sécurité des aliments
(EFSA)*. Des chevaux montrent des signes de reprise de conscience au moment de l’accrochage par une patte sur la chaîne et au moment de leur saignée. À aucun moment, les employés ne réalisent un étourdissement de secours devant les signes de reprise de conscience des chevaux. Sur les images, on peut voir un employé découper la patte d’un cheval encore vivant.
Extrait du rapport du Pr Mouthon concernant l’abattage des chevaux : « Plusieurs autres animaux, sur la chaîne de saignée montrent une reprise de conscience avec les tentatives de relever de la tête, le mouvement des oreilles et des membres non agoniques. »
→ Voir les images d’abattage des chevaux
Gazés au CO2 les cochons suffoquent violemment
La méthode d’étourdissement des cochons pratiquée par l’abattoir d’Alès repose sur une exposition des animaux au gaz CO2. Cette méthode entraîne une souffrance aiguë des animaux. Ils s’asphyxient dans des nacelles surchargées. Les comportements de panique et les manifestations de douleur sont patents. De plus, l’exposition au gaz n’est pas suffisante pour maintenir tous les cochons dans un état d’inconscience jusqu’à leur mort. Aucune procédure d’urgence n’est mise en place pour étourdir les cochons qui reprennent conscience au moment de la saignée.
Extrait du rapport du Pr Mouthon concernant l’abattage des cochons : « Des réactions violentes sont observées pendant environ 30 secondes et l’inconscience semble apparaître après 85 secondes. [[…]] on observe sur les images des porcs montrant des signes de reprise de conscience dans la salle de saignée surtout sur les animaux d’une même nacelle saignés en dernier. »
→ Voir les images d’abattage des cochons
Des étourdissements ratés sur les bovins
De nombreux étourdissements sont ratés. On repère à plusieurs reprises des animaux présentant des signes de conscience que ce soit au sol ou/et pendant la saignée suspendus par une patte à la chaîne d’abattage. Les animaux mal étourdis ne sont pas étourdis une deuxième fois comme l’exige la réglementation. Les règles sanitaires élémentaires ne sont pas respectées.
Extrait du rapport du Pr Mouthon concernant l’abattage des bovins : « Des bovins saignés au sol restent plusieurs minutes avec la tête et la plaie de saignée baignant dans un mélange de sang et d’eau forcément contaminée par les toisons recouvertes de matières fécales. »
→ Voir les images d’abattage des bovins avec étourdissement
Le massacre des bovins non étourdis
L’abattoir viole de nombreux articles de la réglementation en vigueur en ce qui concerne la mise à mort sans étourdissement des bovins, leur causant douleurs et souffrances supplémentaires. Le tonneau de contention n’est pas adapté au gabarit des jeunes bovins. La mentonnière pour immobiliser les têtes est souvent mal utilisée. Les animaux attendent dans le tonneau alors que leur mise à mort doit être immédiate. Le sacrificateur tranche la gorge des animaux par de nombreux cisaillements douloureux. Il ne fait aucun test de contrôle de l’état de conscience des animaux avant de relâcher l’immobilisation. Les animaux sont sortis du tonneau encore conscients, certains tentent de se relever après avoir eu la gorge tranchée. À cause de ces défaillances, la plupart des animaux ont une mort violente et agonisent lentement sous le regard indifférent des employés.
Extrait du rapport du Pr Mouthon concernant l’abattage des bovins non étourdis : « Le piège est conçu pour les gros bovins et pour des bovins plus petits, il est complètement inadapté, ceux-ci tombant dans le piège et présentés sur le flanc et non sur le dos. [[…]] On note un cisaillement pour toutes les saignées et parfois avec des reprises d’égorgement. »
→ Voir les images d’abattage des bovins sans étourdissement
Agonie des moutons abattus à la chaîne
Les moutons sont abattus sans étourdissement. Les moutons vivants et conscients ont pleine vue sur la salle d’abattage. Le cisaillement de la gorge des moutons au moment de la saignée est quasi systématique. Le sacrificateur ne maintient pas la tête des moutons suffisamment longtemps, il ne fait aucun test de contrôle de l’état de conscience des animaux avant de relâcher son immobilisation, comme l’exige la réglementation. De nombreux animaux sont sortis du système d’immobilisation et suspendus encore conscients.
Extrait du rapport du Pr Mouthon concernant l’abattage des moutons : « Tous les égorgements sont effectués par cisaillement, parfois avec des reprises, [[…]] ceci
montrant que le couteau n’est pas en permanence efficace [[…]] mettant en évidence l’incompétence du sacrificateur [[…]] »
→ Voir les images d’abattage des moutons
Carences manifestes des services vétérinaires
L’Office alimentaire et vétérinaire (OAV) européen a déjà relevé à plusieurs reprises les carences des services vétérinaires français. Dans son dernier rapport concernant les abattoirs de volailles, il relève des « graves non-conformités » et « des inspections ante mortem et post mortem dans les abattoirs de volailles qui s’écartent considérablement des exigences établies par le règlement ». Le directeur général de l’alimentation (ministère de l’Agriculture) avait alors répondu : « Oui, nos effectifs sont inférieurs aux normes européennes, qu’on considère trop élevées. [[…]] On assume. L’abattoir est prioritaire et nos effectifs correspondent aux besoins : on a plus de mille personnes dans nos 250 abattoirs ».*
Cette nouvelle enquête montre la faillite des systèmes de contrôle de l’État et un désintérêt alarmant des autorités pour les règles minimales de protection animale et d’hygiène dans les abattoirs.
Contacts presse :
Brigitte Gothière : 06 20 03 32 66 (Paris)
Sébastien Arsac : 06 17 42 96 84 (présent à Alès)
* EFSA, Scientific Report of the Scientific Panel for Animal Health and Welfare on a request from the Commission related to welfare aspects of animal stunning and killing methods, p. 153 (p.182 du pdf)